Garrot tourniquet

Garrot tourniquet – Utilisation en contexte militaire

Le garrot tourniquet est l’un des gestes les plus efficaces pour contrôler une hémorragie massive d’un membre. Sur le champ de bataille, il doit être appliqué rapidement, haut et serré, afin de sauver une vie menacée par exsanguination.

Schéma emplacements tourniquet - bras et cuisses
Emplacements haut et serré : près du pli axillaire / pli de l’aine.

Pose du garrot

En zone de menace directe (sous le feu)

  • Poser le garrot haut et serré, aussi près que possible du pli de l’aine ou du creux axillaire.
  • Exception : si l’évacuation prévue dépasse 2 heures, il peut être placé plus proche de la plaie.

En zone de menace indirecte (zone sécurisée)

  • Poser le garrot immédiatement au-dessus de la plaie.

Principes essentiels

  • Serrer jusqu’à disparition des pouls distaux et arrêt complet du saignement.
  • Si un garrot n’est pas occlusif → poser un deuxième garrot juste en dessous.
  • En cas d’amputation (partielle ou complète), poser un garrot systématiquement.
  • Un garrot trop lâche aggrave l’hémorragie et augmente le risque de syndrome des loges.
    (Le syndrome des loges = augmentation de la pression dans un compartiment musculaire fermé, menaçant la viabilité des tissus.)
  • En chirurgie, des garrots sont utilisés 120–150 minutes sans complication majeure : il n’y a donc pas lieu d’hésiter en urgence tactique.

Recommandations pratiques

  1. Appliquer le garrot au plus près du pli de l’aine ou du creux axillaire.
  2. Serrer jusqu’à l’arrêt du saignement et disparition du pouls distal, puis sécuriser.
  3. Noter l’heure de pose de manière visible (sur le garrot ou un bandeau).
  4. Laisser le garrot apparent pour surveillance.
  5. Si le saignement persiste → poser un deuxième garrot à proximité.
  6. Prévoir une antalgie si possible, sauf en cas de choc hémorragique.
  7. Évacuer vers une structure disposant d’une capacité chirurgicale.

Le principe du « Garrot plus-1 »

L’expérience militaire rapporte qu’environ 10 % des garrots peuvent ne pas être efficaces. Placer un second garrot « en attente » augmente la sécurité :

  • Le second garrot est prêt si la conversion échoue ou si le premier n’est pas occlusif.
  • Lors d’une réanimation (perfusions, transfusion, kétamine) la pression artérielle peut remonter et réactiver le saignement : le garrot «+1» réduit la durée et le volume du saignement réactivé.

Conversion du garrot

La conversion = remplacer un garrot par un pansement hémostatique ou compressif pour limiter les risques d’occlusion prolongée.

  • À envisager uniquement si l’évacuation dépasse 2 heures et qu’une surveillance et un accès chirurgical rapide sont garantis.
  • Jamais au-delà de 6 heures.
Procédure (résumée)
  1. Desserrer le garrot sous contrôle.
  2. Si pas de saignement → laisser les deux en place et panser.
  3. Si saignement → appliquer un pansement hémostatique sous pression 3–5 min.
  4. Si échec → resserrer le garrot distal et garder le second en attente.
Contre-indications à la conversion
  • Amputation.
  • Patient non surveillable (hypothermie, évacuation difficile).
  • Choc hémorragique.
  • Hospitalisation prévue dans un délai < 2 heures.
  • Ne jamais desserrer périodiquement un garrot pour « réoxygéner » le membre.
Exemple pose CAT tourniquet - illustration technique
Exemple d’un garrot type CAT Gen 7 (Combat Application Tourniquet), reconnu par le TCCC.

Importance vitale du garrot

Une étude couvrant plus de dix ans de conflits (Eastridge et al., Journal of Trauma, 2012) montre que :

  • 91 % des morts évitables au combat sont dues à des hémorragies.
  • Parmi ces hémorragies : 13,5 % aux extrémités, 19,2 % jonctionnelles, 67,3 % au tronc.

Conclusion : le garrot est l’un des rares gestes immédiatement efficaces pour sauver une vie sur le champ de bataille.

Sous le feu ennemi, l’entraînement est primordial : la pose doit être automatique, possible sans visibilité et dans les pires conditions. Chaque combattant doit porter son garrot au même emplacement sur la tenue. Le soldat doit être capable de poser son garrot sur lui-même ; sinon, on utilise le garrot du blessé.

La survie repose aussi sur l’évacuation rapide (voir procédure 9-Line MEDEVAC) : le garrot est un maillon de la chaîne de survie.

Note sur le contexte civil

Les indications du garrot sont identiques en civil. La différence essentielle est la durée d’occlusion : les hôpitaux civils sont souvent plus accessibles, le garrot est généralement laissé en place jusqu’aux urgences où une prise en charge chirurgicale rapide est possible. En contexte militaire ou terroriste, les délais peuvent être beaucoup plus longs et la conversion devient une décision tactique.

Références :

  • Eastridge BJ, Mabry RL, Seguin P, et al., Death on the battlefield (2001–2011): implications for the future of combat casualty care. Journal of Trauma 2012; 73(6 Suppl 5): 431–7.

Images : schéma emplacements & illustration CAT fournis par l’ASSO Reconvilier (URL vers fichiers intégrés dans l’article).